Parmi tous les plaisirs, qu’un maire peut ressentir pendant l’exercice de son mandat, je mets en premier et même avant les articles loufoques de Cap’em, la lecture des lettres anonymes.
Amoureux de l’histoire de notre pays, je me transporte en les lisant aux heures sombres de notre histoire où des « lâches » réglaient leur compte avec leurs voisins en les dénonçant sous anonymat à la Kommandantur.
Les temps changent mais les corbeaux demeurent.
Dès ma première élection, de nombreux délateurs m’écrivaient en me traitant de nazi et en déclarant qu’ils n’accepteraient jamais la croix gammée sur notre mairie, ni des camps de concentration à l’emplacement aujourd’hui du potager.
C’étaient des socialistes et des communistes en pleine crise. Ils ont disparu.
La déception de la défaite passée, les auteurs des lettres anonymes s’intéressèrent à ma vie professionnelle, puis à ma vie privée (ça continue du reste) et les injures furent totalement différentes.
Évidemment, je n’aborde pas les missives qui salissent, les mains rien qu’en les touchant et qui sont composées uniquement d’insultes et de diverses ordureries, le tout écrit avec des lettres découpées dans les journaux.
J’en possède quelques-unes de savoureuses.
Dans cette première moitié du 21ème siècle, les lettres anonymes deviennent écologistes et le mécontentement porte désormais sur la qualité de l’air, sur le bruit, sur l’entretien des massifs forestiers, sur le nombre de parkings, sur la taille des haies…
La dernière « bafouille » reçue émanant d’une inconnue portait sur le bruit que le service technique aurait fait un dimanche matin pour nettoyer la place de la mairie, avant la cérémonie du 18 juin 1940.
Cette anonyme exaspérée par son interruption de sommeil, m’accuse de vouloir dépeupler ma ville et ne comprend pas que l’on puisse interrompre ses rêves nocturnes pour une cérémonie « où il y a 3 pèlerins et qui dure 20 minutes ».
Elle considère que le calme, la tranquillité et surtout le respect n’existent pas à Émerainville.
D’après elle, les Émerainvillois sont nombreux à constater mon intérêt à les faire fuir.
Je ne m’étendrai pas sur le raisonnement de cette personne mais je lui conseille de déménager le plus rapidement possible pour profiter du calme, de la sécurité et d’une certaine forme de sérénité qui règne dans nos villes voisines.
Par contre, ce qui m’a le plus peiné dans ce texte, c’est l’ignorance de l’histoire de notre pays. Cette femme ne sait pas d’où elle vient et, sans doute, pas où elle va et dans sa « lettre » elle insulte des millions de morts dont le sacrifice lui permette aujourd’hui d’écrire toutes les bêtises qu’elle désire.
Madame je vous souhaite un bon déménagement
Alain KELYOR
P.S. : il y a quand même un peu de Cap’em dans le style et dans certaines réflexions. J’ai donc des doutes sur la personne.